Sorties de la semaine du 31.07.2024
ONLY THE RIVER FLOWS
Sortie dans les salles de cinéma de Martigny et Vevey
Ce film noir, réalisé par Shujun Wei, est une adaptation de la nouvelle de Yu Hua. Après avoir exploré des récits autobiographiques et des satires sur le monde du cinéma chinois, Shujun Wei s'attaque au genre du film noir avec "Only the River Flows". Le réalisateur explique : "Réaliser Only the River Flows me donne l'occasion de développer un récit dans le cadre d'un genre - ici le film noir, sur une base littéraire : c'est assurément différent du récit auto-biographique ou de la satire du monde du cinéma chinois contemporain qu’exploraient mes deux premiers films." L'adaptation de la nouvelle comporte plusieurs éléments clés : une série de meurtres, l'esprit collectif pesant sur l'individu et la solitude face à un monde absurde. La nouvelle subvertit également le récit policier traditionnel, offrant une œuvre plus secrète et obscure.
Le projet a été soumis à Shujun Wei, qui a trouvé la nouvelle intéressante et offrant une grande liberté d'adaptation. Il a choisi de rendre le ton du film plus réaliste, en se concentrant sur le personnage de Ma Zhe, bien plus qu'un simple observateur des événements.
Le choix de filmer sur pellicule 16 mm est un autre aspect marquant du film. Shujun Wei explique : "Le film étant situé dans les années 90, l'idée d'utiliser à nouveau la pellicule est venue spontanément. La texture même de la pellicule est cohérente avec l’époque dans laquelle se situe le film."
Nathalie Chifflet de "Dernières Nouvelles d'Alsace" souligne que le film séduit par "son utilisation de la pellicule 16 mm au grain rugueux et ses jeux de lumière en clair-obscur". "Le Dauphiné Libéré" note que "c’est dans son ambiguïté que réside la force du film". Quant à "Les Fiches du Cinéma", Florent Boutet qualifie le film de "proposition glaciale et virtuose, qui joue avec les sens du spectateur".
Une exploration de la psychologie tourmentée d'un flic confronté à la misère humaine et au dysfonctionnement des institutions publiques, un film fascinant et mystérieux.
LARGO WINCH 3 : LE PRIX DE L'ARGENT
Sortie dans les salles de cinéma d'Aigle, Martigny, Montreux et Vevey
Pour ce troisième opus, la réalisation passe de Jérôme Salle à Olivier Masset-Depasse, un cinéaste belge connu pour ses œuvres plus intimistes comme "Illégal" et "Sanctuaire". Sa passion pour le dessin et sa formation à l'Institut des Arts de Diffusion sous la tutelle de Jean Van Hamme, le créateur de Largo Winch, ont fait de lui le candidat idéal pour apporter un nouveau souffle à la saga.
Tomer Sisley, fidèle à son habitude, a exécuté lui-même ses cascades, notamment dans une scène de course-poursuite de sept minutes. "Je n’avais jamais autant travaillé pour pouvoir effectuer moi-même mes propres cascades que sur ce film", confie l'acteur, malgré de nombreuses blessures. James Franco, également au casting, a pris part aux chorégraphies de combat sans doublure, apportant une authenticité supplémentaire aux scènes d'action.
Clotilde Hesme, qui incarne Chloé Riva, a influencé l'écriture du scénario en proposant de ne pas suivre le cliché de la romance facile avec Largo, rendant leur relation plus complexe et nuancée. Élise Tilloloy, jouant Bonnie, a adopté un accent québécois pour son rôle, se préparant en immersion totale au Canada.
Le tournage s'est déroulé dans des conditions extrêmes, de la chaleur accablante des mines de Charleroi aux froids polaires de la Bulgarie. Olivier Masset-Depasse s'est inspiré de réalisateurs comme Ridley Scott et du dessinateur Moebius pour les décors, tout en intégrant des éléments du cinéma coréen et de la saga John Wick pour le côté spectaculaire.
Ce film se démarque de ses prédécesseurs en présentant un Largo Winch plus humain et vulnérable, confronté à des enjeux contemporains comme les technologies vertes. Basé sur les tomes 13 et 14 de la bande dessinée, ce nouvel opus rompt avec le passé tout en restant fidèle à l'essence de la saga.
Les effets spéciaux du film sont subtils et presque invisibles, avec des scènes tournées en Belgique transformées en paysages enneigés canadiens grâce à des ajouts numériques discrets. Un tournage respectueux de l'environnement a été privilégié, avec une réduction maximale de l'empreinte carbone.
Les fans de la série, ainsi que les nouveaux venus, apprécieront ce retour en force de l'héritier milliardaire, plus déterminé que jamais à protéger ceux qu'il aime et à déjouer les complots qui menacent son empire.
MOTHERS' INSTINCT
Sortie dans les salles de cinéma d'Aigle, Montreux et Vevey
Réalisé par Benoît Delhomme, "Mothers' Instinct" met en vedette Jessica Chastain et Anne Hathaway, qui incarnent respectivement Alice et Céline. Le film, qui évoque l'ambiance hitchcockienne des débuts de la présidence de John F. Kennedy, est une adaptation du roman noir "Derrière la haine" de la romancière belge Barbara Abel. Cette transposition américaine reste fidèle à "Duelles", situant l'action dans les environs de New York au lieu de la banlieue bruxelloise, avec des maisons décorées de manière encore plus chic.
L'initiative de ce projet revient à Jessica Chastain, productrice du film, séduite par le caractère thriller de "Duelles". Le look de son personnage, Alice, s'inspire directement des héroïnes d'Alfred Hitchcock, tandis qu'Anne Hathaway, dans le rôle de Céline, adopte une apparence rappelant Jackie Kennedy, chapeau compris. Cette approche visuelle marque une différence par rapport au film original, où les apparences des deux femmes étaient plus libres.
Cette version américaine, scénarisée par Sarah Conradt-Kroehler, met en lumière la place des femmes dans la bourgeoisie américaine des années 60 et les rôles restrictifs qui leur sont imposés. Contrairement au film original, cette adaptation montre que les deux femmes avaient chacune une carrière avant d'être reléguées à leur vie domestique : Alice était journaliste et Céline infirmière. L'accident mortel du fils de Céline, tombé d'un balcon sous les yeux impuissants d'Alice, déclenche une spirale de chagrin, de culpabilité et de comportements troubles, révélant des aspects monstrueux derrière les façades parfaites.
Le film questionne l'instinct maternel et explore l'emprise maternelle, tout en examinant les dynamiques du couple à travers la caméra expérimentée de Benoît Delhomme. Sa vision implacable et sa capacité à capturer des images fortes de sens enrichissent le récit.
"Mothers' Instinct" offre une vision sombre et intense des relations humaines, portée par des performances remarquables de Jessica Chastain et Anne Hathaway, et un regard perçant sur les apparences et les vérités cachées.
LES FANTÔMES
Sortie dans les salles de cinéma de Martigny et Vevey
Le parcours atypique de Jonathan Millet, réalisateur de Les Fantômes, est marqué par ses études de philosophie et ses voyages à travers le monde pour filmer des pays souvent inaccessibles. Cette expérience lui a permis de développer un œil unique pour capturer les visages et les atmosphères en quelques plans. Après plusieurs documentaires remarqués, dont Ceuta, douce prison et Dernières nouvelles des étoiles, Millet se lance dans la fiction avec une histoire profondément ancrée dans la réalité des victimes de guerre.
Le projet de Les Fantômes est né de l'intention initiale de réaliser un documentaire sur un centre de soins pour victimes de guerre. Mais, au fil de ses recherches, Jonathan Millet découvre des réseaux souterrains et des groupes traquant les criminels de guerre en Europe. Inspiré par des articles de Libération sur la cellule Yaqaza, il décide de transformer son idée en une fiction, capturant l'essence des récits qu'il avait entendus.
Le casting a été une étape cruciale et longue d’un an. Jonathan Millet a rencontré des comédiens arabophones dans plus de 15 pays avant de choisir Adam Bessa pour incarner Hamid. Bessa, avec son aura de gravité et sa capacité à transmettre une profondeur émotionnelle intense, s’est révélé parfait pour le rôle. Millet explique : "Comme je viens du documentaire, et que j’ai rencontré de vrais prisonniers syriens, il suffit d’une phrase ou d’un silence pour sentir la puissance absolue de la force d’un vécu aussi terrible. Et cela Adam a su le retranscrire."
Le tournage, qui s’est déroulé sur quarante jours entre Strasbourg, la Jordanie et Berlin, a nécessité un travail minutieux sur les gestes et l’intériorité du personnage de Hamid. Jonathan Millet souhaitait une approche subjective et sensorielle, reléguant hors-champ les images de guerre et de torture pour se concentrer sur les sensations et les doutes de son protagoniste. Cette méthode a permis de créer une immersion totale dans l'intériorité de Hamid.
Les Fantômes a reçu des critiques élogieuses. Selon Le Point, Jonathan Millet réussit un "suspense au cordeau en même temps qu'une étude mélancolique et profonde des traces que laisse le trauma sur la personnalité". La Voix du Nord loue la précision clinique du récit et l’interprétation d’Adam Bessa, tandis que Le Monde souligne l’angoisse sourde et grandissante diffusée par le film. CinemaTeaser parle d’une "maîtrise de chaque instant pour l’un des premiers films les plus impressionnants vus depuis longtemps", tandis que Le Journal du Dimanche le qualifie de "stupéfiant de maîtrise, d’intelligence et de subtilité".